Ontario : des progrès

On est heureux d'être toujours en vie ce dimanche matin à Mattawa. Alors qu'on range nos affaires rapidement, Tim nous propose un café. On le refuse gentiment pour deux raisons : on n'a pas envie de remettre un pied (plutôt un nez!) dans la maison et de toute façon on a prévu de faire du stop au Tim Horton, la chaîne de café canadienne très, très, très populaire. On commande chacun un café, dépose les sacs dehors et je prends le premier tour. C'est fou ! Une grosse majorité des voitures, au lieu de continuer à l'Ouest, s'arrêtent au Tim. Je tends le pouce mais toutes les voitures tournent avant. A l'intérieur du Tim, un homme me parle. C'est un hollandais ayant immigré au Canada qui boit son café avant d'aller à la messe. Il nous voit faire du stop  et ça l'intéresse. A côté, d'autres villageois se moquent de nous en anglais. Finalement, après deux heures, un 4x4 qui sort du drive ouvre sa fenêtre à ma hauteur :
- Hé ! Tu vas où?
Il peut nous déposer à North Bay, la prochaine ville.  Je cours, tape à la fenêtre et on saute dans la voiture. Le courant passe tout de suite avec Wayne. C'est un vétéran, jeune retraité d'une quarantaine d'année. Il a pas mal voyagé  ces dernière années : en Asie et en Amérique du Sud et il est super content de nous prendre dans sa voiture. Il nous offre deux cigares "au thé" que le gouvernement lui offre suite à une blessure. Il nous propose de rester chez lui aujourd'hui et le soir, ce que nous ... refusons car nous sommes un peu stressés par le peu de km parcourus ces derniers jours, et il est seulement 10h30. Il nous pose donc à  l'endroit idéal pour continuer notre route vers Grand Sudbury. 
Une dame nous dépose un peu plus loin à Nipissing Ouest. Elle se rend à un concert et sur la route, écoute en boucle un CD agréable. Elle fait un détour pour que nous puissions facilement repartir. A peine déposés, tout de suite en voiture. Un franco-ontarien qui revient de la messe nous avance. Je lui demande de quoi il était question aujourd'hui et il me répond : C'est un peu toujours la même chose. Un nouveau 4x4 s'arrête rapidement. L'homme à l'intérieur a grandi à Toronto et explique que gamin il s'est amusé à se perdre dans le métro une demi journée... les parents ont dû appeler la police. Enfin, un couple nous propose de nous amener à Grand Sudbury. Ils vont y chercher leurs enfants. Ils ont un magnifique chien noir, jeune et très craintif. Il a sûrement reçu des mauvais traitements avant d'être recueilli par le couple. Il a tellement peur de nous que le mari est obligé de le tenir dans ses  bras.
Déposés rêvant un restaurant, on mange un burger en regardant du foot américain. Marche, puis stop sur deux insertions qui mènent à la 17. Elouan arrête une voiture. En courant vers elle, je vois un Jésus sur la plaque d'immatriculation. Je vais voir le conducteur et je trouve un prêtre. Encore. Il peut nous conduire sur 200km vers Sault-Saint-Marie. Assez rapidement, je lui demande ce qu'il pense des tensions au sein de l'église catholique entre le pape et certains évêques américains. Il me répond que le pape a des positions politiques et que ce n'est pas son rôle. Le pape est une pierre. Ca ne bouge pas!Il regrette que la foi, le mystique soit  relayé au second plan. Je l'harcèle de questions. Il a des positions très conservatrices : il fait la messe en latin, critique une baisse de la foi, considère que les autres églises que l'église catholique n'ont pas d'autorité. Il pense que les communistes et les socialistes ont élaboré un plan d'infiltration afin de fragiliser l'église catholique. En conséquence, les prêtres ne sont plus croyants. Ils ne croient plus  en la résurrection ou en l'eucharistie. Il n'y a plus de péché.... Il croit fortement au retour du diable. 
Il nous dépose sur la 17 à 100km de Sault-Saint-Marie et nous tendons un peu notre pouce, sans  succès. On s'enfonce donc entre quelques arbres et on plante la tente. On hallucine de la vitesse à laquelle on a avancé aujourd'hui. A priori, le stop est plus fréquent dans la région de Grand Sudbury et on a même croisé un autre pouceux. On s'endort non loin de la 17 au bruit des camions. 
Non loin de notre tente

Au réveil, on n'a plus de batterie sur nos téléphones, et sur une de nos deux lampes. Il est urgent de trouver un endroit où les charger. Sur la route, une mustang s'arrête immédiatement. L'homme va à SSM et nous emmène dans ce qui est considéré comme le centre ville : un mall, c'est à dire un centre  commercial. On va voir le canal et le pont qui mène aux Etats-Unis. Au moins, ça, ça vaut le coup. 
On pense se poser quelques heures dans un Tim Horton pour recharger nos batteries, et remplir nos gourdes  vides. On marche une éternité pour tomber sur un Tim où il n'y a pas de prise. C'est quand même con pour un café. On ne s'éternise pas et on part en direction de Wawa, vers le nord. On se poste sur un carrefour à feux où la circulation est assez dense. Un chauffeur qui roule dans le sens contraire, arrêté au feu, me demande de venir le voir. Il me glisse 15 dollars dans les mains. Surréaliste. Puis, deux personnes à la suite nous conseillent de descendre le boulevard pour faire du stop. Et quand on y arrive, en effet, le trafic est moins dense.
La 17 devant longe le lac supérieur sur 700 kilomètres jusqu’à Thunder Bay. Mais on nous a prévenu, c’est une session difficile. On nous a souvent parlé la prochaine ville sur notre chemin, Wawa, comme d’une ville horrible pour faire du stop : on pourrait y être coincé plusieurs jours. Mais on n’y est pas encore… Cela fait 3h30 que l’on attend en sortie de SSM et personne ne s’intéresse à nous. Cerise sur le gâteau, suite a une fausse manip’, j’ai effacé tous les livres de ma liseuse.
Puis Steeve s’arrête. Il a un lit à l’arrière de son véhicule et réarrange ses affaires. Il s’en va aussi en Colombie-Britannique et se propose de nous emmener a Wawa ou il souhaite dormir ce soir. C’est un voyageur qui s’est souvent rendu en Océanie. Son record d’attente en stop est de trois jours en Australie. Il a voyagé de pleins de façons différentes et a même expérimenté la vie de sans abri quelques temps. Il a 40 ans mais en parait bien moins. Il n’a commencé à voyager qu’à partir de ses trente ans. Il a grandi en Inde et est arrivé au Canada vers 15-20 ans.
La 17 est magnifique ici. Sur notre gauche, le soleil se couche sur le lac Supérieur et les arbres sont d’un rouge uniforme à perte de vue. Steeve nous dit qu’il préfère dormir sans tente quand il voyage, et donc, le soir, alors qu’il nous dépose devant le lac de Wawa, nous décidons de dormir à la belle étoile. Mauvaise idée : à cause de l’humidité, la rosée s’installe partout sur nos duvets. Heureusement, on reste au chaud à l’intérieur.
La route 17
En vidéo 
Entretemps, Steeve nous a propose de nous emmener à Thunder Bay le lendemain. On se retrouve au matin pour parcourir 500 km. Professionnellement, il a fait un peu de tout : DJ, guide en nature, restauration, vidéos… mais dès qu’il peut éviter de travailler pour se consacrer à ses activités, il le fait. On écoute de la musique tout au long du trajet.
Réveil sur le lac Wawa
Arrive à Thunder Bay, je réalise l’état de fatigue dans laquelle on est après 5 nuits de bivouac. Je réserve une chambre sur airbnb très abordable. Steeve continue sa route mais on lui propose de prendre une douche dans notre logement. Owen, notre hôte, est très sympa. On rencontre aussi Marie, une autre locataire qui se rend également en Colombie Britannique dans sa voiture aménagée, mais ne part que dans deux jours. Je vais faire les courses et je me retrouve embêté : pas de boite d’œufs avec moins de 12 œufs, pas de sachet de moins de 400grammes de bacon… Le soir, on se cuisine une énorme plâtrée de pate et on se garde des restes pour le petit déjeuner. 

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